Le plus irlandais des châteaux français, Sully, en Bourgogne du Sud, s’inscrit dans plus de 1000 ans d’Histoire. Il a, entre autres, vu naître le futur président de la IIIe république, Patrice de Mac Mahon, Maréchal de France et 1er Duc de Magenta. Aujourd’hui, la famille Mac-Mahon vit toujours au château, avec Amélie de Mac Mahon, 4ème Duchesse de Magenta et ses deux enfants. Très attachée à ses terres, elle décide de les gérer dans le respect de l’environnement qui les entoure.
Une maison de campagne à Sully
Le Château de Sully est connu pour être le plus grand château Renaissance en Bourgogne du sud. Protégé au nord par le château de Châteauneuf et au Sud par le château de Couches, c’est aussi une demeure campagnarde, une marche du royaume, stratégique mais non défensive. Entourée de bois, ce fût depuis l’origine une réserve pour la chasse comme nous le rappelle l’imposante porte ouvrant sur sa cour Renaissance. Néanmoins, aujourd’hui et depuis une vingtaine d’années, la famille Mac Mahon préfère de loin entretenir des relations harmonieuses et amicales avec la faune qui fait la richesse du domaine. Désormais, le vieux cerf, jadis chassé, vient de temps à autre offrir un peu de sa prestance à ceux qui ont la chance de l’apercevoir.
Un tournant dans la gestion du domaine de Sully
Le potager du château clos de mûrs présente « 6 grands carrés entourés d’arbres fruitiers en espalier », un vivier et un pigeonnier. Il aurait été redessiné par le célèbre paysagiste Henri Duchêne au XIXème siècle (celui-là même qui offrit le parc à l’anglaise au château de Chaumont sur Loire). Aujourd’hui, suite à la pollution des douves entourant le château, Mme Amélie de Mac Mahon, passionnée par son jardin, a décidé de gérer, dorénavant, ce potager de façon durable et respectueuse de l’environnement.
« Le Jardin Potager du Château est une véritable invitation à essayer de se remémorer le nom de telle variété de plantes ou de vous donner envie de vous mettre aux plaisirs du désherbage et de la cueillette. (Surtout en période de grand travail dans le vignoble à Chassagne-Montrachet lorsque notre équipe de jardiniers est ailleurs !) »
Ainsi la permaculture entre au château par la grande porte offrant à ses visiteurs l’occasion de découvrir une autre façon de jardiner et de concevoir des systèmes qui soient à la fois résilients, autonomes et qui améliorent leur environnement du sol au plafond (qualité de l’air, de l’eau, du sol, création de liens humains, etc, …). Dans tous les cas, ce potager interpelle. Sa gestion provoque des discussions, des échanges, etc … Certains y voient un laisser-aller non digne du château, alors que d’autres admirent cette explosion de biodiversité.
Au-delà du potager de Sully
L’environnement étant devenu plus sain, une nouvelle espèce de chauve-souris a de nouveau élue domicile au domaine. N’ayant pas encore été répertoriées, ces nouvelles habitantes prennent un nom rappelant Sully.
En parallèle, dans la cour Renaissance, pratiquement chaque fenêtre est agrémentée de nids d’hirondelles qui nous accueillent dans leur ronde virevoltante. Alors oui bien évidemment, la présence de ce joli volatile s’accompagne de quelques coulures disgracieuses le long de fenêtres mais ce n’est rien face à la fierté de voir revenir toute cette vie. Ne dit-on pas que « L’hirondelle est un présage d’heureux augures et dans le monde entier, elle est considérée comme un porte-bonheur », alors pourquoi s’en priver.
Quant aux pigeons, l’accueil est moins amical. La fiente des animaux agresse littéralement les pierres du château qui s’effritent et dégradent sensiblement le bâti. La famille fait alors appel à des maîtres fauconniers afin de faire comprendre à ses hôtes que leur présence serait souhaitée moins envahissante.
Enfin, le potager permaculturel pourrait être considéré comme un jardin laboratoire permettant d’expérimenter à petite échelle « une approche globale de gestion circulaire des ressources en favorisant le développement du sol ». Rien ne doit sortir, chaque déchet est, en fait, une ressource potentielle entrant dans un cycle vertueux, aggradant ainsi durablement l’écosystème. L’ambition serait alors de transposer cette philosophie à des échelles plus importantes sur les terres de la ferme du château.
Entre le patrimoine et le respect de la nature, un lien étroit
Les douves souffraient de la pollution engendrée par la gestion du potager. Ainsi, faire le choix de la préservation de la nature implique sans nul doute une préservation de nos vieilles pierres alors que ces dernières offrent une vitrine majestueuse à ce changement de paradigme dont le monde a besoin. Plus que jamais, il est nécessaire de faire bouger les lignes vers plus de bon sens, d’harmonie et d’entraide entre toutes les espèces vivantes.
La loi de la jungle ce n’est certainement pas celle du plus fort, c’est surtout et avant tout la collaboration entre les espèces » Gildas Véret.